Regards sur Micberth - Mot-clé - toubibCe site est consacré à M.-G. Micberth (1945-2013) : sa vie, son œuvre, sa pensée.2024-03-18T20:50:19+01:00urn:md5:ac4b6ea9a30e8880b48c8c986eb72543DotclearLa mort du pèreurn:md5:0be393e39e3a63b85897bd55bcf7b9832016-01-17T18:46:00+00:002016-01-17T20:56:56+00:00AMIci et làActual-HebdoAsudamcardiologuecimetièrefossoyeurshôpitalJean RoyermamanMicberthmortobsèquespèretoubibéglise <p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;">Janvier 2016 sonnant le glas pour de
nombreuses personnalités, les hommages fleurissent çà et là. Ce qui m’a remis
en mémoire celui de Micberth à son père Georges, Breton d’origine, décédé le 20
février 1973. </span><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt; text-transform: uppercase;">é</span><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;">tonnante nécro
parue dans </span><em style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;">Actual-Hebdo</em><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;"> quelques
semaines plus tard sous le titre « Papa ».</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;"><img src="http://micberth.org/dotcl/public/.La_Salle_s.jpg" alt="La_Salle.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" /></span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;">« Télégramme. Moi assis avec mes amis D.
Femme m’apporte, l’oeil éteint, triste nouvelle. Elle tend : « Ton
père ». « Mort ? » J’ouvre télégramme. Je lis : père
décédé. Deux mots. Obsèques vendredi 23. J’arrive pas à décoller mon regard du
papier bleu. Père décédé. Alors comme ça papa a p’us ! Saute dans voiture
avec femme. Arrive chez maman. Toute noire, recroquevillée, malade. Famille
plein partout, la plaie. Apprends que papa est mort d’un infarctus du myocarde
après repas. « J’ai mal dans poitrine », a-t-il dit.
« Couche-toi », a répondu maman, « vais décommander coiffeur et
appeler toubib. » Toubib arrive clic clac. Toubib généraliste fait une
drôle de bobine. C’est grave. Appelle cardiologue. Cardiologue arrive. 17
heures. Faut envoyer papa Asudam dans grand hôpital blanc, tcheuf tcheuf.
Cardiologue dit à maman : « C’est grave mais pas désespéré. » On
ne veut pas maman à l’hôpital. </span><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt; text-transform: uppercase;">ç</span><span style="font-family: TimesNewRomanPS; text-indent: 14.2pt;">a
servirait à rien qu’ils disent. « A demain », lui dit-on. Clip clap
clop, maman retourne chez elle, chancelante. Elle se couche. Dring. 2 heures du
matin. C’est un monsieur tout noir dans le noir, une enveloppe blanche à la
main. Le monsieur bafouille : « Votre mari est mort. » Maman
saute dans les escaliers, tourne quatre ou cinq fois autour de table de la
salle à manger en geignant et s’effondre.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family:TimesNewRomanPS">« Voilà comment tout cela s’est passé.
Mon père avait 58 ans, à faire ; 35 ans de mariage samedi, un bail.
C’était un couple de petits ouvriers bien polis, bien honnêtes, bien
transparents. Maman se retrouve seule et sans ressources. Papa avait déjà perdu
un oeil dans son travail, ses vertèbres étaient usées jusqu’à la moelle, sa
prostate bourgeonnait, de violentes céphalées chroniques depuis l’adolescence,
aussi. Tout pour la joie ! Depuis deux ans, son sale con d’employeur avait
institué les primes de productivité. Alors mon papa à moi, tout fier mais
poussif, voulait damer le pion à ses jeunes collègues et se tuait au boulot.
Pas exactement pour damer le pion d’ailleurs, mais plutôt pour éviter de se
faire foutre à la porte quelques années avant la retraite. La porte, c’eût été
la misère. La tête, les vertèbres, la prostate, tout résista sauf le coeur. Pas
très consciente, maman a dit : « Ils sont quand même gentils ses
employeurs. Ils ont payé l’enterrement. » Mais non. Les employeurs n’ont
pas le sens de l’humour. C’est papa qui avait cotisé à une nouvelle caisse qui
couvre les frais d’enterrement pour un forfait de <st1:metricconverter productid="1000 F" w:st="on">1000 F</st1:metricconverter>.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family:TimesNewRomanPS">« J’ai été jusqu’à l’hôpital. On a sorti
papa du réfrigérateur pour me le montrer. Dans la mort il était beau comme il
n’avait jamais été de son vivant. Eau bénite. Mise en bière. Longue procession.
<span style="text-transform:uppercase">é</span>glise. Curé. Orgue.
Chansonnettes. Rebénédiction. Remerciements. Montée au cimetière. Longue et
lente marche dans le territoire des morts sous un vent glacial. Je portais
presque maman qui chaloupait comme au temps des tangos de sa jeunesse*. Papa
est descendu paré de sa robe de bois et de fer au fond d’un grand trou, tout au
fond. Fossoyeur s’est avancé vers moi : « On y va
m’sieur ? » Oui, j’ai fait de la tête. Puis je me suis approché du
grand trou pour y jeter une poignée de terre. Ma femme aussi. Ma mère aussi. Et
aïe donc ! Les fossoyeurs ont craché dans leurs mains. Ma femme a glissé
un biffeton dans la paume grassouillette de l’ordonnateur, et nous sommes
repartis sur le petit chemin qui ne sentait pas la noisette mais l’encens. Le
temps pour moi de lire une grande pancarte sur laquelle <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Royer_(homme_politique)">Royer</a> dit
autoritairement qu’on est des beaux dégueulasses si on ne nettoie pas la tombe
de ses morts. Quelle délicatesse Royer ! On s’est bien embrassés avec la
famille, bien promis de ne pas attendre dix ans pour se revoir, ou la mort d’un
autre. J’ai grimpé dans ma voiture. Maman était là, assise, et pleurait
doucement dans ses mains. » (Micberth-Asudam, « Papa » in <em>Actual-Hebdo</em> n° 12, samedi 3 mars
1973)</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family:TimesNewRomanPS"> </span><em style="text-indent: 14.2pt;"><span style="font-family:TimesNewRomanPS">Son
dernier tango à... Tours</span></em><span style="text-indent: 14.2pt; font-family: TimesNewRomanPS;"> !
(Note manuscrite ajoutée par Micberth à la fin de l’article.)</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-indent:14.2pt"><span style="font-family:TimesNewRomanPS">NDRL : Jean Royer était alors maire de
Tours.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify"><span style="font-family:TimesNewRomanPS"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify"><span style="font-family:TimesNewRomanPS"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify"><span style="font-family:TimesNewRomanPS"> </span></p>