Les gens sont méchants. Déclaré persona non grata en Tunisie et prié de rentrer à la maison, BHL plaide non coupable : ses intentions étaient louables. Le « nouveau (pas tant que ça) philosophe » serait-il incompris ? Il y a trente ans déjà, Micberth dénonçait le jeune homme dans La Lettre (avril 1985) : « Bernard-Henri Lévy n’est pas le grand gosse débile que je croyais cocoté par le tout-Paris avachi et pervers, c’est une petite vipère comme tant d’autres qui inocule son venin dans les chairs saines qui passent à portée de ses crochets.

« Le ludion, tout de go se veut déjà un classique et il serait particulièrement de mauvais goût de le prendre pour ce qu’il est, c’est-à-dire, un parfait turlupin. A chaque fois que ce nuisible pose sa crotte dans un magazine, on chapeaute sa petite déjection avec le surtitre « Idées ». Initiative fort judicieuse du metteur en pages si l’on tient absolument à en faire accroire, car toujours le produit disqualifie l’étiquette.

« Bernard-Henri Lévy a des haines, oui, mais des « idées », point.

« Il tremble de berlue car partout il croit voir renaître, surtout dans l’anodin, l’hydre pouacreuse du fascisme et du nazisme. Même chez le turbulent Nabe qu’il traite dans L’Evénement du jeudi d’« écrivaillon nazi ». Je ne sais pas quelle zaniniérie se cache dans ou derrière le Nabe dont je parle, mais je donnerais bien les oeuvres complètes de l’Hébreu de chez Grasset contre un point virgule de « Au Régal des vermines », même trou du cul comme se voit l’auteur, même gluante taupe coco comme on me dit qu’il serait. Cela reste à vérifier. Bref, Lévy endort, Nabe éveille.

« Maintenant, je comprends les terreurs de Lévy. Quand on est un petit mec de la littérature, un failli, un réputé plagiaire et un pou satisfait des idées ; quand on se sait évanescent zigomar et que l’on veut en serrant ses petits points volontaires faire grande oeuvre utile, on s’accroche désespérément à la sacro-sainte démocratie républicaine... »

Il faut avouer que le costard était bien taillé et qu'il tombait impeccablement. Les actes n’ont cessé de corroborer les écrits depuis lors. 

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Quand il évoque sa vie, Micberth écrit : « B.-H. Lévy ricana sur mon théâtre qui annonçait les colucheries ». Pourquoi ? C’est une longue histoire... Gérard Lecha nous éclaire dans l’avant-propos de son livre « Micberth et le théâtre en question avec les dégagements autobusiaques ». En 1972, il fut reçu maître ès lettres avec la mention « très bien » et les félicitations du jury pour son mémoire sur le théâtre micberthien, qu’il proposa tout naturellement aux éditeurs parisiens. « Il me paraît cocasse et édifiant tout à la fois, écrit-il, d’évoquer la façon dont ce texte fut « reçu », début 1975, par un jeune directeur littéraire de chez Grasset, un jeune normalien plein d’avenir du nom de Bernard-Henri Lévy. Ce grand critique, cet esprit délié et de haut vol, comme on devait le savoir par la suite, considéra les deux premières parties de mon ouvrage comme d’une « très grande qualité et méritant l’édition » ; en revanche, ma troisième partie relevait à ses yeux, « du canular » et n’était absolument pas comparable avec les deux autres, surtout parce que cela manquait complètement de sérieux ». En réalité, ce qu’il faut savoir, c’est que la réputation de Michel-Georges Micberth dans les milieux de l’intelligentsia parisienne de l’époque était tellement sulfureuse qu’il n’était pas question d’envisager la publication de cet ouvrage en l’état. »

Précisons que les deux premières parties étaient le fruit d’une compilation sur l’histoire du théâtre alors que la troisième concernait l’expérience théâtrale de Micberth et de la JFPFles dégagements autobusiaques (annonçant le Café de la Gare), à la fin des années 1960.

 Le mot de la fin reviendra à Micberth : « Lévy est un minus habens glaireux. Chacune de ses déclarations insolentes, excessives et provocatrices fait naître la haine. » CQFD.