« La lutte contre le trafic de drogue est notre priorité numéro un », a déclaré Emmanuel Macron, en visite à Marseille le 1er septembre dernier. Vaste programme et vœu pieux ? Une déclaration qui mériterait d'être suivie d'effet...

C'est un fléau de longue date, auquel Micberth s'est attaqué dans les années 1966-1967 en créant un comité antidrogue dans sa bonne ville de Tours. A l'époque, quand il évoque la filière marseillaise et dénonce les dangers du trafic pour la jeunesse de notre pays, personne n'y croit. Surtout pas l'intelligentsia, lectrice indulgente de Ginsberg et de Burroughs. Faisant fi des menaces et des agressions contre sa personne, il mène son enquête et prépare un dossier étayé. Il démonte les filières locales, dénonce la banalisation du phénomène et le mimétisme qu'il pressent chez des milliers de jeunes fragiles, angoissés. Il tente de se battre du côté des forces de l'ordre avec qui la collaboration est parfois difficile.

Alain Camille (futur A.D.G.) écrit en 1968 dans un article rédigé pour le journal Révolution 70 : « Une action est envisagée. En quinze jours d'enquête, nous démasquons trois réseaux à Tours. Constitués pour la plupart par de jeunes désoeuvrés qui passent souvent les frontières, qu'elles soient scandinaves ou arabes. Ils sont animés par une gent dite intellectuelle qui, sous prétexte de « recherches », empoisonne littéralement leurs petits camarades. (…) Afin de prendre le réseau la main dans le sac – ou plutôt, la cigarette dans la main – nous montons une provocation avec la bénédiction des inspecteurs précités. Le commissaire principal avait donné son accord et mobilisé (ciel !) une voiture dite « panier à salade », pleine de penseurs à képi. Le coup échoua... »

En fait, l'enquête (gênante) révélant l'implication d'enfants de notables locaux comme passeurs ou consommateurs, Micberth ne peut aller plus loin dans son action qui dérange. Il devra se contenter de dénoncer le danger à travers ses écrits et notamment dans ses spectacles, les « Dégagements autobusiaques » qui décoiffent Jean Royer, le maire de la ville.

En 1976, il écrit dans son journal (inédit) :

« 16 mars 1976. Il y a dix ans, ces jours-ci, je créais le « premier » comité antidrogue français. Dix ans déjà.

« Pour les connards de flics, la drogue n'était pas un « phénomène » français. Pourtant, des dizaines de jeunes pourrissaient sur les trottoirs. La came se fabriquait par tonnes à Marseille et empoisonnait les États-Unis.

« Quelle histoire pour obtenir le droit de porter un flingue ! On voulait probablement que je me batte à mains nues comme OSS 117. Quel idéaliste imbécile et meurtrier j'étais !

« On me demandait de trois à six mois pour analyser les échantillons et, souvent, le pauvre flic qui marchait avec moi, était-il obligé de payer de sa poche les analyses.

« Ah ! Ma pauvre dame, la société évolue vite et oublie ses pionniers...

« Qui se souvient de mes gueulements d'hier ? (…)

« Il n'en est pas moins vrai que les autorités françaises portent l'entière responsabilité de l'empoisonnement de la jeunesse. Vieux cons qui réagissent toujours avec cinq années de retard, gros culs variqueux chevillés aux banquettes confortables du fonctionnariat.

« Et pendant ce temps, des Rimbaud aux iris couleur de sable humide se shootaient une dernière fois, implosant sous les effets de l'overdose, alors que ces messieurs, lecteurs de François Brigneau, le crâne bourré de conneries préfabriquées, rotaient la blanquette acide de Médème-leur-flome, en répétant pour la milliardième fois que le problème de la drogue n'est pas français.

« Mais quand, bon Dieu, cette connerie criminelle va-t-elle finir ? »

Proscrivant tout ce qui peut altérer la lucidité de l'homme, Micberth annonce en mars 1970, dans le premier article de son programme aux cantonales : « Je suis contre l'utilisation de la drogue par les adolescents, mais pour la liberté d'en consommer aux adultes responsables. Ce n'est pas mon goût, mais cela regarde ceux qui s'y soumettent. »

Sources : Micberth anarchiste de droite (François Richard, 1992)), Pardon de na pas être mort le 15 août 1974 (M.-G. M., 1977), Journal 1976 (Inédit).