19 mars 2023. M.-G. Micberth nous quittait il y a dix ans. Triste anniversaire. « L'idée de la mort est enchâssée dans ma vie, écrivait-il en 1975. Sa présence me convainc de ma fragilité, de mon pouvoir limité et temporel, mais elle me donne les signes de mon éthique, me libère de vains scrupules. » Fragilité temporelle, certes, mais pourtant ce fut une vie foisonnante que la sienne, menée sous le signe du « désespoir constructif » depuis son entrée en poésie à l'âge de huit ans, pour échapper au réel mortifère et voir la vie « autrement ». Nous sommes en 1953 et dix ans plus tard, il entreprendra son grand combat culturel, politique, social pour une « révolution des consciences », le déconditionnement de la société, entraînant de nombreux élèves et collaborateurs dans son sillage.

Insolent, doué d'un humour féroce, il cultivait le goût de la provocation pour faire réagir, démasquer la bêtise, le mensonge, appuyer là où ça fait mal, dénoncer, prévenir que le monde courait à sa perte. En 2011, il déclare : « Je suis un vieux fou. La vie n'a pas réussi à me pourrir, à me calmer. Je suis toujours béat devant les vertus cardinales. J'aime le bien, j'exècre le mal et suis un des derniers à savoir encore faire la différence. La camarde est pour bientôt et je me trouve à des années-lumière de l'homme que j'aurais aimé devenir. »

S'indigner, encore et toujours, sera son leitmotiv. Ne rien accepter de l'inadmissible, se rebeller, désobéir : « Désobéissez et nous sortirons de ce processus névrotique qui nous mène progressivement à l'anéantissement de l'espèce. » Dès 1969, Micberth dénonce « l'imposture démocratique » et combat l'État républicain. Il écrit à la fin des années 1990 : « Il est incontestable qu'une volonté organisée tente de nous détruire. La culture, c'est d'abord la rébellion : l'ordre démocratique qui se veut la vérité et le bien, n'aime pas les têtes qui dépassent. »

Micberth puisait-t-il « ses cheminements logiques » dans un fonds immémorial, comme l'affirmait un de ses proches ? Né d'un père breton et d'une mère angevine, on ne peut douter de l'importance qu'il accordait aux racines, de son respect du passé. Il fera même de cet attachement son métier à la fin des années 1980 et sera éditeur anthologue au service de notre patrimoine historique local : son « Grand Oeuvre ». « L'Histoire véritable est celle dont on retrouve les traces avant les faits, qui s'exprime par les faits eux-mêmes et non, trente ans plus tard, par les élucubrations des écrivains appointés. »

Philalèthe plutôt que philosophe, chef de file de la Nouvelle Droite politique, principal représentant actif de l'anarchisme de droite, M.-G. Micberth rêvait d'une « nouvelle aristocratie », au sens originel : un système politique basé sur une hiérarchie des compétences et des mérites. « Ce n'est pas une lapalissade de dire que la politique change l'homme et non, l'homme la politique. Gouverner la valetaille désinformée et escroquée contraint le tribun politicard à vendre quotidiennement son âme à tous les diables du Temple. »

Alors, faut-il rire ou pleurer ? Le monde peut-il changer ? « On peut avoir le désespoir constructeur. On peut être beau dehors et dedans, créer l'harmonie. On peut être un être humain sans honte. » On est bien loin du wokisme ambiant ! Micberth nous manque pour y voir clair.

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